Trois initiatives remarquables à Strasbourg. En avez-vous entendu parler ?
Écrit par Emilie ARDUINO-VITALIS sur juin 2, 2020
Trois initiatives locales par et pour des publics défavorisés qui ont vu le jour pendant le confinement à Strasbourg. Une incroyable solidarité spontanée née dans le contexte de crise sanitaire.
1. Une fabrication de masques improvisée par des réfugiés
L’équipe de l’association AMSED, composée d’une dizaine de bénévoles, réfugiés et volontaires européens, a rejoint l’élan de solidarité nationale contre le Covid-19. Dans le contexte de pandémie et de pénurie de masques chirurgicaux, l’équipe a spontanément transformé son atelier d’éco-couture offrant une possibilité d’insertion aux réfugiés, en atelier de fabrication de masques.
Avec l’aide d’un styliste de l’association, Farid Merah, l’équipe a confectionné des modèles conformes aux normes fixées par l’État.
On a ressenti cette envie, cette volonté de la part des réfugiés de donner d’eux-mêmes et d’apporter à la société
Lidia, cahrgée de mission à l’AMSED (Migration, Solidarité et Echanges pour le Développement)
L’idée est partie de l’action spontanée des réfugiés, qui, au début du confinement, ont commencé à confectionner des masques chez eux. L’association a donc décidé de regrouper ce travail et de l’organiser les personnes et d’organiser leur travail afin qu’il soit plus productif.
Ils ont eu le courage de sortir de chez eux et de se regrouper pour travailler, au moment où tout le monde avait peur.
Le plus difficile a été au début la coordination du travail à distance, précise Lidia. De plus, les normes de masques ont très régulièrement évolué, ce qui a rendu beaucoup de masques désuets. Cela n’a pas empêché l’équipe de persévérer dans son travail.
Les masques fabriqués étaient destinées principalement aux travailleurs sociaux, et aidants à domicile. Et réalisées à partir de tissus donnés par différents organismes ou achetés grâce à l’argent collecté par une cagnotte en ligne. A l’heure actuelle, entre 500 et 600 masques ont été confectionnés. Et l’atelier n’a pas prévu d’arrêter sa production tant que le besoin sera présent.
2. La bagagerie Mimir, un repère essentiel pour les SDF pendant le confinement
La Maison Mimir est un lieu socio-culturel alternatif et autogéré à destination des personnes sans domicile. Ouverte en 2010, la bagagerie a été un des premiers services à voir le jour dans la maison. Ce service est unique à Strasbourg et propose de garder les affaires personnelles des SDF dans des casiers sécurisés pour une durée de deux mois (renouvelable).
Lors de notre rencontre avec Roger et Justine, deux gérants de la bagagerie, ces derniers nous ont souligné l’importance de ce service au moment du confinement.
Beaucoup d’autres services partenaires, comme les douches de La Bulle, ont fermé temporairement. La bagagerie avait encore plus de sens à ce moment là.
En effet, la bagagerie, étant un service social, a pu rester ouverte quelques semaines au début du confinement. Mais avec les cas de COVID qui augmentaient, la bagagerie a finalement décidé de fermer son accueil pour protéger ses usagers. Malgré cette décision, une alternative a été trouvée grâce à l’engagement spontané et personnel de quelques bénévoles, qui se sont confinés à Mimir malgré ses conditions inconfortables (pas d’eau chaude ni de chauffage, pas de lits…). Un numéro d’urgence et des astreintes ont été mises en place pour que les SDF puissent récupérer leurs affaires en cas d’urgence. L’objectif était d’éviter qu’ils stationnent sur place et qu’ils entrent en contact avec d’autres personnes.
Roger et Justine ont expliqué que les nouvelles contraintes ont été particulièrement difficiles à respecter car habituellement, la bagagerie est un lieu de réunion et d’échange entre les bénévoles et les sans-abris. Ces derniers peuvent profiter d’un café, d’une collation et d’un moment chaleureux au moment lors de leur visite. Des évènements artistiques et culturels, une bibliothèque et des lieux de vie sont également organisés.
Un dixième anniversaire à célébrer
En 2020, la Maison Mimir fête ses 10 ans d’existence et compte les marquer. Pour l’occasion, 10 évènements ont été prévus. Si certains ont été annulés à cause de la crise sanitaire, d’autres auront lieu en septembre. « On attend le retour à la normale de la situation. Comme la maison vit grâce au don en prix libre, les évènements sont primordiaux pour son bon fonctionnement », précisent les deux bénévoles.
Les Mimiriens et les usagers attendent donc impatiemment de pouvoir retrouver la maison et sa bagagerie, si indispensables pour eux.
Toute la programmation par ICI
3. Le Centre Bernanos aidé par des initiatives solidaires individuelles
Le Centre Bernanos est une association qui accueille une trentaine de jeunes migrants, des mineurs isolés en attente de reconnaissance de leurs droits.
Durant le confinement, le centre n’aurait pas pu garantir un hébergement correct sans l’aide spontanée des citoyens locaux, nous a expliqué Odile Casting, membre de l’administration du Centre Bernanos.
« Chaque jour, le chef de Paulus Bistrot (situé dans le quartier de la Krutenau) a préparé gratuitement le déjeuner pour les jeunes », précise Odile. La première semaine du confinement le chef a d’abord vidé les stocks destinés aux repas qu’il prévoyait de servir à ses clients. Le centre lui a ensuite fourni les denrées alimentaires.
Des strasbourgeois ont spontanément déposé des fruits et légumes, des produits laitiers, des biscuits, devant le Centre.
Ceci a été rendu possible grâce aux cagettes prévues à cet effet, déposées devant le Centre, où les personnes pouvaient déposer des plats faits maison ou d’autres contributions en nature. Des dons financiers ont également été faits à la structure, notamment par des particuliers qui ne pouvaient plus se déplacer pour préparer bénévolement les dîners, comme ils avaient l’habitude de le faire.
En temps normal, la majorité des jeunes accueillis sont scolarisés dans des établissements publics et privés. Durant la période de confinement, il a fallu transformer Bernanos en école provisoire.
La poursuite des cours a notamment été permise grâce à Emmaüs Connect à des particuliers, qui leur ont offert une flotte d’ordinateurs portables. C’est ainsi que chaque jour, les jeunes ont communiqué via Skype avec des dizaines de bénévoles qui leur ont apporté de l’aide aux devoirs.